INFIRMIERS LIBERAUX : COMMENT CONSTITUER SA PATIENTELE ?

En décidant de se lancer en libéral, l’infirmier doit nécessairement s’interroger sur la façon dont il va se constituer une patientèle. Plusieurs choix s’offrent à lui, en fonction de sa zone d’installation et de son degré de prise de risque.

L’installation en libéral requiert un grand nombre de démarches dont une, fondamentale, qui consiste à réfléchir à sa zone d’exercice.
De ce choix découle une stratégie à mettre en place afin de s’assurer d’avoir la capacité de se constituer une patientèle ou de la maintenir.
« Le choix du territoire, en fonction du zonage, permet de définir un peu plus précisément si l’infirmier libéral va racheter ou créer sa patientèle », indique Agathe Blondeaux, juriste spécialisée en professions libérales de santé chez Fiducial.
Lorsque la zone est définie, il faut ensuite mener une étude afin de déterminer l’existence d’un marché, ses perspectives d’évolution, son fonctionnement (patientèle permanente ou ponctuelle), le profil des patients, les besoins du territoire, l’état de la concurrence et les conditions d’accès aux marchés (zonage).

Les futurs infirmiers libéraux (idels) peuvent obtenir de nombreux renseignements via l’Agence Régionale de Santé (ARS) ou avec l’outil Rezone de l’Assurance Maladie, qui permet de connaître les caractéristiques d’un territoire.

En zone sur-dotée

En zone sur-dotée, les infirmiers ne peuvent pas s’installer comme ils le souhaitent. Une installation n’est possible qu’à la suite d’un départ et à condition que l’idel sur le départ ait expressément nommé son successeur.
« L’investissement de départ va alors être important puisque l’infirmier qui souhaite s’installer va acheter son conventionnement et sa patientèle », explique Agathe Blondeaux. Si en achetant la patientèle, il intègre un cabinet de groupe, il n’a alors pas la main sur les frais (loyer, charges, etc…). Le coût de son intégration peut ainsi s’avérer plus élevé qu’initialement prévu.
Plusieurs éléments entrent donc dans la balance pour faire son choix, notamment la capacité d’emprunt ou d’épargne. « Cet investissement initial d’achat de patientèle doit être mis en corrélation avec le temps nécessaire pour obtenir la rentabilité de l’activité libérale souhaitée afin de savoir si la démarche envisagée est la meilleure », complète la juriste.
« Cet investissement, poursuit-elle, est souvent avantageux, ou du moins plus rapidement qu’en débutant sans patientèle, car l’idel dispose immédiatement d’une patientèle et peut donc rapidement garantir un chiffre d’affaires. »
Il doit toutefois s’assurer, en rachetant la patientèle, qu’il va pouvoir poursuivre la spécialité de l’infirmier cédant, ou continuer à faire vivre les liens créés avec les acteurs du territoire.
L’ancien idel doit d’ailleurs lui présenter ses patients et lui faire jouir de sa réputation. Ce raisonnement s’applique d’ailleurs à toutes les zones d’installation.

En zone sous-dotée

En zone sous-dotée, par définition, le nombre de professionnels de santé est moindre par rapport aux besoins en soins. En toute logique, l’installation ne devrait pas nécessiter un investissement de départ.
Néanmoins, l’intégration dans le territoire doit tout de même être pensée. « Préalablement, il peut être opportun de se mettre en relation avec les prescripteurs, les pharmaciens et les autres paramédicaux afin d’annoncer sa venue, conseille Agathe Blondeaux. C’est une façon de garantir le maintien d’une patientèle existante et l’arrivée de nouveaux patients. »
Si l’investissement initial est moins important, la rentabilité peut être également moins rapide. L’idel va en revanche devoir maîtriser ses coûts, en choisissant par exemple son local. Mais « habituellement, dans ces zones sous-dotées, les idels vivent assez rapidement de leur activité », précise Agathe Blondeaux.

En zone intermédiaire

Quant aux zones intermédiaires, celles où l’équilibre est plus ou moins atteint entre les praticiens et les patients, « ce sont des zones d’incertitude, souligne la juriste. Il va donc être nécessaire, pour le futur idel, d’approfondir son étude de marché, afin de bien déterminer le temps requis entre l’installation et la rentabilité envisagée de l’entreprise ».
Il pourra ainsi identifier s’il est plus opportun d’acheter la patientèle ou de s’installer directement tout en ayant à l’esprit qu’il lui faudra prendre le temps de se faire connaître. Il est recommandé de se faire conseiller par un expert-comptable qui connaît le domaine d’activité, la zone d’exercice et l’environnement professionnel du futur cabinet.

La valorisation de l’installation

Une fois installé, l’idel doit entretenir son réseau, pour attirer de nouveaux patients et pour fidéliser sa patientèle s’il l’a rachetée, car le libre choix du patient est un principe inscrit dans le Code de santé publique.
Il est d’ailleurs difficile d’anticiper une fluctuation du volume de patients. « Il faut, de temps à autre, analyser la composition de sa patientèle, à titre d’exemple la pyramide des âges ou encore le type de pathologies, prévient Agathe Blondeaux. L’idel doit être vigilant afin d’anticiper les risques de variations d’activité et donc de revenu. La stratégie à adopter se décide en collaboration avec l’expert-comptable, de façon à créer une zone tampon. Car le vrai stress repose toujours sur la gestion des charges en cas de baisse de revenu, ce qui s’anticipe. »
Il peut, par ailleurs, pour se faire connaître des patients du territoire, publier deux annonces dans le journal local, organiser l’inauguration de son cabinet et créer un site internet, mais uniquement pour partager des informations en lien avec l’exercice de son métier et les soins.
Il est en outre utile de démarcher les prescripteurs, les pharmaciens, les laboratoires de biologie médicale, les autres professionnels de santé, ainsi que la municipalité. « Il est conseillé de nourrir des liens avec la zone d’installation et de s’informer sur les besoins du territoire. Il faut avoir conscience que cela prend un certain temps de développer sa patientèle. La réputation est très importante », recommande Agathe Blondeaux.

source : Laure Martin – ActuSoins

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